Arts
Le café, c'est la France ? Retour sur un mythe national
Avec Pascal Ory, professeur d'histoire contemporaine à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne
Dans le monde entier, c’est une affaire entendue : le café, c’est la France. Historiquement, cela ne va pas de soi puisqu’après tout c’est l’empire ottoman qui invente la formule et toute une Europe chic, de Rome à Vienne, qui plante le décor. Reste que le mythe dit beaucoup sur la façon dont, à partir du XIXème siècle et jusqu’à aujourd’hui, ce lieu –qui est aussi un temps qu’on y passe, avec les personnages de sa Commedia, du patron à la serveuse en passant par le client mutique ou trop bavard- s’est enraciné dans les profondeurs de la société française. Sans doute parce que le pays des révolutions et de la république a donné à ce qui fut le salon des élites une tournure populaire, définitive.
On évoquera ici l’art et la manière dont les écrivains et les dramaturges, les peintres ou les cinéastes ont fait de l’« estaminet », du « bistrot » ou du « grand café », de Paris comme de province, le lieu du refuge, de la camaraderie et de l’amour. Café-concert, café-tabac, cénacle pour la Bohême, cellule pour les militants, repaire pour la pègre, bureau pour l’écrivain et, par dessus tout, miroir où toutes les France se reflètent : voilà le café, « sérieux comme le plaisir ».