Langue

  • Français

Date

13 fév. 2018

Àla fin du film Bottle Shock (2008) qui porte sur le Jugement de Paris de 1976, on peut entendre un personnage dire : « Nous avons brisé le mythe... de l'invincibilité des vins français. Et pas seulement en Californie. (…) Nous boirons des vins... et bien, d'Amérique du Sud, d'Australie, de Nouvelle-Zélande, d'Afrique, d'Inde, de Chine. »

Une telle vision, largement construite a posteriori, repose sur l’idée qu’un Nouveau Monde des vins s’est imposé, justement face à un Ancien Monde. Organisé par la France, ce dernier regroupe quelques pays européens périphériques, comme l’Espagne ou l’Italie. Des pays qui sont considérés comme produisant des vins fins, mais de manière artisanale, sans grandes connaissances des procédés de vinification, et de façon plutôt conformiste. Tout à l’inverse de la Californie bien sûr…

Rien n’est moins évident. L’œnologie doit par exemple beaucoup aux travaux du bordelais Émile Peynaud (1912-2004) qui dès les années 1950 travaille sur les processus chimiques de la vinification. Ses travaux auront des répercussions essentielles dans le monde entier. Ce qui montre bien que la séparation entre un Ancien et un Nouveau Monde est loin d’être opérante. Aucune frontière nette ne les sépare ; au contraire, des liens intimes les lient. Preuve en est que de nombreuses entreprises sont présentes aujourd’hui aux quatre coins du monde. Une multitude de professionnels passe de l’un à l’autre au gré de leur carrière... voire même des saisons ! Les flying winemakers, la première profession au monde à travailler sur plusieurs continents au gré des saisons, vinifient tantôt dans l’hémisphère Nord, tantôt dans l’hémisphère Sud.

Il est en revanche certain que de nombreuses innovations proviennent de cet ensemble de nouveaux producteurs de vin de qualité, emmenés par les États-Unis. Un exemple ? La manière de dénommer les vins par cépage et non plus par région. Elle ne cesse de prendre de l’ampleur dans notre quotidien.

Raphael Schirmer, maître de conférences en géographie, Université Bordeaux Montaigne
©Jonathan van der Knaap